Marco Berrettini / iFeel4

Les ingrédients sont très forts. Chacun risquerait d’induire une orientation univoque, pourtant Marco Berrettini réussit à merveille sa mixture. La nouvelle création, dernier opus de la série iFeel procède d'une ambiguïté troublante, subversive, accueille les contradictions patentes, multiplie les niveaux de réception et les strates d’affects.


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Gaëlle Bourges / Lascaux

Remontant à rebrousse poil l’histoire de l’art et des représentations, toujours prête à démasquer les discours dominants qui persistent et finissent par s’imposer au sens commun, attentive au frémissement silencieux, mutin, de la présence des femmes dans cet univers encore largement soumis à la pulsion scopique masculine, Gaëlle Bourges bâtit une œuvre salutaire dans le paysage chorégraphique hexagonal. Minority Studies, développements récents des théories du genre, références savantes à des peintures qui continuent de peupler l’imaginaire contemporain trouvent sur le plateau des formes toujours justes, empreintes d’humour, terriblement incarnées, subversives.


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Marco Berrettini / iFeel3

Le pouvoir hypnotique de iFeel2 semble relâcher son emprise dans iFeel3. Le subtil venin distillé par cette nouvelle création de Marco Berrettini est autrement toxique. Le cercle s’élargit à quatre performers, les boucles répétitives deviennent ellipses où la figure géométrique entre littéralement en conjonction avec le procédé rhétorique, car la trajectoire sans cesse reprise par les danseurs inclut une part aveugle, un manque, une soustraction. Cycle de l’éternel retour, jeu de différences et de répétitions, révolutions en biais autour d’un axe constitué par l’estrade où la musique est produite en live.


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VOLMIR CORDEIRO / L’ŒIL LA BOUCHE ET LE RESTE

La gourmandise est éclatante. Les yeux s’écarquillent, les bouches restent longtemps ouvertes dans des grimaces qui figent les visages et découvrent des dents voraces. Les bras et les jambes se raidissent et s’écartent comme pour embrasser le monde. La succion est redoutable, semble répondre à un impératif absolu, en prise au centre même du corps, qui en mobilise tous les ressorts physiologiques et imaginaires – absorption furieuse, résolue, à grande échelle – peut être trop volontaire ? 


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Mel O’Callaghan / Dangerous on-the-way

La descente est vertigineuse. Ce travelling vertical nous entraine dans le secret des strates minérales. La poésie compacte des titres des projets plus anciens menés par l’artiste en Australie nous revient à l’esprit : Each Mineral Flake Of That Night Filled Mountain (2011), Each Atom Of That Stone In Itself Forms A World (2010). La fluidité du mouvement et l’abstraction de l’image nous font perdre pied. Il y va d’une plongée dans les profondeurs de la matière géologique mais aussi visuelle. L’amorce sensorielle de Dangerous on-the-way est redoutable : face à cette projection qui investit toute une paroi de l’espace sombre imaginée par Mel O’Callaghan au cœur de son exposition au Palais de Tokyo, le sol commence à se dérober, nous nous retrouvons comme en apesanteur.


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Cinéma / Parole #33. Yaïr Barelli

Yaïr Barelli n'est pas familier de l'outil vidéo. Son travail se déploie ordinairement dans le champ du spectacle vivant, et plus singulièrement de la danse et de la performance. Ici, la vidéo est un outil au service de multiples interrogations. Il permet notamment de questionner la place qu'un artiste peut et doit occuper dans les dispositifs de résidence de tous ordres.


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Marlène Saldana & Jonathan Drillet / Le Sacre du Printemps arabe

Une épaisse fumée aux fragrances épicées remplit le Studio 3 du CND. L’atmosphère est très chargée, lourde – tout comme les sujets que Marlène Saldana et Jonathan Drillet s’apprêtent à apporter sur le plateau. De Gennevilliers à The Armory Show de New York, de Paris à Marseille en passant par la Suisse, sous le nom de code The United Patriotic Squadrons of Blessed Diana, les deux comparses bâtissent depuis plusieurs années déjà une œuvre haute en couleurs, débordante d’énergie, qui revendique une dimension spectaculaire particulièrement prononcée, pour mieux s’attaquer à des problématiques complexes, liées aux jeux géopolitiques et aux petites et grandes bassesses de la classe dominante.


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Alexandra Bachzetsis / Massacre : Variations on a theme

La ritournelle est écrite d’avance. Il y a quelque chose de très familier et pourtant de très efficace dans ses boucles envoutantes. Les deux pianos à jardin semblent avoir pris une troublante autonomie. Le plateau demeure vide, rectangle blanc minimaliste, terrain de latences et de possibles, surface de résonance qui amplifie les charges impérieuses de la partition de Tobias Koch. L’attente est potentialisée par les jeux de regard des spectateurs placés dans une disposition bi-frontale. La tension est déjà palpable quand Lenio Kaklea pénètre l’espace performatif.


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Carole Douillard / Rencontre autour de Body of Index

The Viewers nous interpellaient par l’insistance de leur regard et de leur présence silencieuse dans les espaces du Palais de Tokyo ou encore du MAC/VAL. Dans le cadre d’une exposition dédiée à Yvonne Rainer au Centre d’art contemporain La Ferme du Buisson, Waiting Room nous plongeait dans l’atmosphère trouble d’un espace neutre respirant un certain désœuvrement masculin directement inspiré de la situation des Hittistes en Algérie. Carole Douillard travaille essentiellement dans le champ de la performance. Son exposition Le Corps du répertoire / Body of Index, fruit d’une résidence au sein du Centre des archives du Féminisme dans le cadre d’un projet soutenu à la fois par le Frac des Pays de la Loire et l'Université d'Angers, est encore visible jusqu’au 11 mars à la Galerie 5, alors que l’artiste est en train de préparer le tournage d’un film dont l’image sera signée par Babette Mangolte, figure incontournable de l’avant-garde cinématographique new-yorkaise des années 70. Rencontre autour du corps, du document et des problématiques liées au genre, lignes de force d’un travail qui s’impose par la justesse de son engagement plastique et politique.


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Gestes déplacés

Si le corps chorégraphique invente son propre espace à travers le geste, il se peut aussi que le geste déplace l'espace dans lequel il se déploie et élargisse par ailleurs son champ en intégrant une gestuelle qui peut relever du quotidien. La chorégraphie ne se situe pas alors comme une forme close dans un espace neutre, elle s'en empare, se déployant jusqu'à faire référence à un espace socio-économique qui tend à la normalisation, et propose une façon de voir et d'agir qui résiste à cette forme de contrôle comportemental.


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