Recouvrir, ensabler, copier, traduire, restituer
Exposition
Kadist Art Foundation du 25/02/2017 au 16/04/2017

L’expression « en creux » est généralement employée pour décrire une situation par le manque ou l’absence, une vision indirecte, une façon de lire entre les lignes. Elle peut être reliée à l’archéologie, discipline qui spécule, à partir de la présence d’objets et l’étude de leur fabrication par l’homme, une histoire de leurs usages dans le contexte social auquel ils ont pris part.

La notion de « biographie » des objets —développée par les anthropologues Igor Kopytoff et Arjun Appadurai *1 , a permis de placer l’attention du côté des artefacts, de leurs trajectoires physiques et légales, ponctuées par des changements de propriétaires et de contextes ; chaque étape ajoutant une strate à l’histoire de l’objet et à sa valeur. L’immuabilité des objets se confronte à la mutation de leurs interprétations.
« (…) Le cadeau d’aujourd’hui est la marchandise de demain. La marchandise d’hier est l’objet d’art trouvé de demain. L’objet d’art d’aujourd’hui est la camelote de demain. Et la camelote d’hier deviendra l’héritage de demain. »*2

L’exposition Recouvrir, ensabler, copier, traduire, restituer réunit des projets artistiques qui étudient des objets pris dans des situations de conflit, qui en sont véhicules ou témoins. Ces œuvres sont présentées à différentes étapes de leur existence pour souligner la méthode de travail des artistes, articulant leurs références historiques et une réponse à l’actualité politique. Pio Abad inventorie la collection du couple dictatorial philippin Ferdinand et Imelda Marcos (1965-1986), et les œuvres de propagande qu’ils ont commanditées, tandis que le régime actuel semble raviver leur mémoire. Chrysanthi Koumianaki s’empare de slogans politiques prélevés récemment dans les rues d’Athènes pour les retranscrire dans un langage crypté atemporel.
Les œuvres de l’exposition participent à un débat plus large autour du devenir des artefacts, de leur conservation et de leur restitution, dans le cadre des processus et écrits décoloniaux des dernières décennies. En reproduisant des plats Amérindiens, Mariana Castillo Deball recherche leur fonction et souligne les erreurs de restauration qui ont conduit à différentes interprétations. Les répétitions publiques d’Alexandra Pirici mettent en jeu la restitution par le British Museum des marbres du Parthénon au Musée de l’Acropole. La vidéo de Baris Dogrusöz propose une d’étude du site archéologique de la citadelle d’Europos Doura en Syrie et de son ensevelissement comme stratégie de résistance. Tandis que les crises internationales actuelles perpétuent des conflits d’intérêts et soulignent la relation entre art et pouvoir, les modèles de gouvernance se lisent à travers la question de l’héritage culturel.

Avec : Pio Abad, Mariana Castillo Deball, Baris Dogrusöz, Chrysanthi Koumianaki, Alexandra Pirici



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