Malena Beer / Un-visible

Je désire y rester encore un moment. Le Palais de Tokyo, avec ses immenses espaces en friche, est soudainement devenu un endroit familier, empreint d’une douceur flottante, un lieu presque chaleureux, agité ça et là par des courants d’énergie. Je viens de le découvrir autrement, les yeux fermés, j’ai entendu ses bruits, ses respirations, son souffle, j’ai pu emprunter ses cheminements souterrains, capter des bribes de discussions, m’imprégner ses fragrances de béton brut, tâtonner sur des pentes légères ou des marches métalliques. J’avais les yeux fermés et Malena Beer dansait autour de moi, m’entrainant dans l’exploration insensée de Un-visible.


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Romain Kronenberg / Marcher puis disparaître

Une grande ville vue de loin, frappée d’une douce lumière, comme au début d’un conte. Son nom même paraît tiré d’un rêve : ?ereflikoçhisar, le « château des honorables étreintes ». Par où commence Marcher puis disparaître. Plan après plan, Romain Kronenberg nous fait entrer dans cette cité turque, sans jamais effacer complètement la distance. Il fait attention à l’étrangeté des choses et nous communique ce sentiment propre au voyageur, qui se découvre « chez lui » alors qu’il est « à l’étranger ». Minarets éclairés, feux dans la campagne, aube bleue, gestes des joueurs : toute cette vie inconnue apparaît familière. « Il me semble que je serais toujours bien là où je ne suis pas ».


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Révolution Zendj de Tariq Teguia

Ne rien lâcher, persister à travers les flux, contre les souffles contraires, au risque de disparaître ou de se fondre dans la lutte, et redresser la carte des espoirs.


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Films cicatrices. Trouvé et Le Saut des deux fous au Ciné 104

La programmation de courts métrages est un acte critique en soi. Chaque séance produit ses effets de montage, de sens, qui ne sont pas sans influencer notre réception des œuvres. À l’heure où la plupart des films sont vus sur un ordinateur via des plateformes en ligne, il est plus que jamais nécessaire de rappeler que le cinéma tient aussi à une certaine façon de montrer les choses.


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Emmanuelle Huynh / Tôzai!...

Un lourd rideau obstrue la cage de la scène. Emmanuelle Huynh choisit d’ancrer la danse entre ses plis, dans un mouvement suspendu, sans cesse recommencé, d’ouverture. Tôzai! (d’Est en Ouest) – l’amplitude est énorme, a vocation à embrasser le monde. Le cri ritualisé qui lance toute représentation de Bunraku affirme littéralement cette volonté. La chorégraphe s’est inspirée de certains éléments du théâtre traditionnel japonais. C’était aussi pour elle une autre manière de revisiter une question qui nourrissait déjà son premier travail en solo, Mùa, en 1995.


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Emmanuelle Vo-Dinh / Sprint

Les cercles qu’elle dessine sur le plateau pourraient sembler dans un premier temps identiques. Maeva Cunci creuse le sillon. Chacun des mouvements concentriques de sa danse, de sa course, l’amène plus loin, ne se déployant pas tant dans l’étendue que dans la profondeur. Emmanuelle Vo-Dinh entraine la performeuse dans une descente vers les origines archaïques de la danse : rythme, souffle, volonté aveugle de mettre un pas devant l’autre, jusqu’à l’épuisement. D’autres états de corps jaillissent, le solo devient foison, l’air se charge de visions innommables. Vertigineux !


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Jan Fabre / Le pouvoir des folies théatrales

Le titre est somptueux, mais derrière sa superbe se cache un jeu de mots intraduisible en français. Le ver est dans le fruit : l’expression flamande y contient littéralement un cadavre. Deux ans auparavant, Jan Fabre entamait, avec son œuvre fleuve C’est du théâtre comme c’était à espérer et à prévoir, un vaste et radical programme de refonte de l’art scénique mettant au cœur d’un alliage explosif de danse, textes, chants et images, l’expérience vécue jusqu’à l’épuisement du geste performatif. Le Pouvoir des folies théâtrales revient sur cette intuition fondatrice, l’affine, la précise, re-déploie dans des configurations autrement complexes ses lignes de force impétueuses, son énergie enragée.


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Grand Magasin / D’orfèvre et de cochon

Mettre au travail la notion même de travail, la déplacer, la malmener gentiment, y injecter de la poésie, y explorer d’autres imaginaires possibles, voici le pari relevé avec aisance et inspiration par Grand Magasin. 


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Eszter Salamon / Monument 0 : Hanté par la guerre

Le plateau se tient à la lisière du visible, l’obscurité est à la fois épaisse et poreuse, condition de possibilité nécessaire aux phénomènes d’apparition que la pièce enclenche. Des corps se laissent deviner, étendus sur le sol. Un chant se lève, plainte qui semble venir de très loin, du plus profond des entrailles, chuchotement qui gonfle, s’affirme, ample, déborde les gradins.


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The Yvonne Rainer Project. Lives of Performers

La Ferme du Buisson accueille une belle exposition qui orchestre la rencontre entre Yvonne Rainer et des artistes de la jeune génération. The Yvonne Rainer Project est passionnant de part la manière dont il articule dans un mouvement rhizomatique différentes pratiques plastiques, filmiques ou performatives liées au corps et à l’image, à la fiction et à la présence. 


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