Je t'ai dans la peau de Jean-Pierre Thorn aux Editions commune

Projet initié à l'occasion d'une projection de Je t'ai dans la peau de Jean-Pierre Thorn, qui a eu lieu lors d'une rétrospective consacrée au cinéaste au Polygone étoilé à Marseille, ce nouvel opus de la collection "Cinéma hors capital(e)" que proposent les Editions commune réunit diverses plumes pour donner à voir comment des préoccupations toutes singulières — mai 68, la lutte syndicale et le mouvement hip hop notamment — se rejoignent dans un désir sincère de comprendre les aspirations des classes populaires. Et il n'est pas anodin que plusieurs formes cinématographiques — films militants, fiction, documentaire — puissent servir à cette expression.

Ce que porte le film est mis en évidence par un travail graphique remarquable, qui chemine à travers les strophes de la chanson d'Edith Piaf qui donne son titre au film, et par prolongement, au livre lui-même. Cet ouvrage dessine un territoire où la parole passe par des voix et sensibilités hétérogènes : une lettre d'Alain Badiou à Jean-Pierre Thorn donnée à titre d'appel en quatrième de couverture, la retranscription de l'émission radio que Serge Daney a consacré au film à sa sortie en 1990, documents d'archives et témoignages de syndicalistes qui évoquent tout ensemble la CGT, les prêtres ouvriers, le féminisme, textes enfin, de critiques, cinéastes et écrivains, qui cherchent à mettre en lumière ce qui est à l'œuvre dans les films de Jean-Pierre Thorn. Les films, et leurs projections.

Réalisé dans le giron de Film Flamme et du Polygone étoilé, cet ouvrage rappelle en effet dans son agencement et dans son contenu — on pense notamment au texte de Jean-François Neplaz qui prend pour point de départ l'expérience d'une projection —  que les films sont travaillés jusque et y compris dans la manière dont les publics y accèdent, et que leur forme dépend essentiellement du lien qu'ils arrivent à tisser entre des singularités. En cela, cette forme est mobile, elle vit de se préciser constamment, de se chercher et de se trouver dans les regards qu'elle rencontre, dans les mouvements qu'elle suscite. L'écrit en est un. Le livre Je t'ai dans la peau a ainsi remis sur le métier, pour notre temps, le film de Jean-Pierre Thorn qui, comme une chanson populaire, traversant des gorges qui l'attendaient, qu'il attendait, découvre que la jeunesse en lui ne s'est pas éteinte.

Je t'ai dans la peau de Jean-Pierre Thorn, film flamme / livre-DVD, cinéma hors capital(e) numéro 3, éditions commune, 2014 - 25 €


| Auteur : Rodolphe Olcèse

Publié le 23/07/2014